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Loi El Khomri : des locaux gratuits pour les syndicats

Selon une estimation de l’Inspection générale des Affaires sociales (IGAS), les syndicats bénéficient de 250 à 800 implantations fournies gracieusement par les collectivités locales. Le gouvernement veut désormais dédommager les syndicats qui perdraient leurs locaux. Un scandale !

Obliger les mairies à loger les syndicats

Le projet de loi dit El Khomri, du nom de l’actuel ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, s’intitule en fait « projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et pour les actifs ».

Quelques mesures de ce projet de loi ont défrayé la chronique, certaines vite oubliées pour ne pas mécontenter les syndicats, en particulier la CFDT très liée au Parti socialiste.

Mais ce projet de loi comporte, à ce jour, quelque 70 articles. Autant dire que nombre de dispositions ne sont pas connues. Il faut, pour cela, avoir lu en détail le texte préparé par le gouvernement. Cet exercice, fastidieux il faut bien le reconnaître, permet de prendre conscience que le projet de loi ne se préoccupe pas seulement des entreprises et des actifs. Il s’intéresse aussi aux organisations syndicales.

C’est le cas du chapitre III du Titre II qui s’intitule : « Des acteurs du dialogue social renforcés ». Son article 15 traite des locaux syndicaux, et plus précisément de ceux mis à disposition par les mairies.

Selon l’étude d’impact du projet de loi, « la mise à disposition de locaux, au profit des syndicats est un usage répandu dans de nombreuses collectivités territoriales. Cela prend le plus souvent la forme de bourses du travail ou de maisons des syndicats, un lieu où sont réunis les différents syndicats de salariés pour exercer leur activité (réunions, permanence d’accueil syndical, services d’entraide…). »

« Un usage répandu dans de nombreuses collectivités territoriales » signifie en fait pour le ministère, qui s’appuie sur une estimation de l’Inspection générale des Affaires sociales (IGAS), entre 250 et 800 implantations. Une fourchette très large qui va du simple au triple. Et qui représente un montant de dépenses non négligeable pour les dites mairies, difficile cependant à chiffrer puisque l’on ne connaît pas le nombre exact de locaux mis à disposition, ni leur surface.

Si 250 locaux de 12 m2 sont mis à disposition, à raison d’environ 13 €/m2 le loyer moyen en France par mois, cela représente l’équivalent d’une dépense – ou un manque à gagner – de 468 000 € par an. Mais si les locaux sont au nombre de 800 et d’une surface de 24 m2, on atteint alors presque 3 millions d’euros. Et nul doute que certains locaux dépassent allègrement cette surface.

Le ministère est préoccupé par le fait que cette pratique de mise à disposition de locaux soit insuffisamment sécurisée par la loi.

En effet, l’article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales ne traite que des locaux communaux. Or, d’autres collectivités territoriales (départements, régions, communautés de communes…) mettent des locaux à disposition des organisations syndicales ou contribuent à leur prise en charge. Il faut donc étendre « le dispositif actuel de mise à disposition des locaux communaux à l’ensemble des collectivités territoriales et de leurs groupements ».

Par ailleurs, on a vu ces derniers temps, au gré des changements de majorité, des maires qui ont souhaité mettre fin à cette pratique. C’est le cas, par exemple, à Chartres ou à Châteauroux. Les organisations syndicales ont porté l’affaire en justice, mais n’ont pas obtenu gain de cause. Les jugements rendus ont, en effet, considéré qu’il n’y avait pas de droit acquis à occuper les locaux.

D’autres mairies commencent à réclamer des loyers que, la plupart du temps, les syndicats refusent de payer. Ce qui pourrait aboutir, là aussi, à des expulsions.

Dans un courrier commun daté du 18 mai 2015, sept confédérations syndicales ont demandé au ministre du travail de mettre en place une obligation d’hébergement par les collectivités.

Sans aller jusque là, le projet de loi reconnaît que les syndicats exercent, dans ces locaux, des missions d’intérêt général auprès de leurs militants, des salariés, mais aussi des demandeurs d’emploi, des étudiants, des retraités. Par conséquent, dit-il, il convient « de préserver la situation des occupants ». C’est ainsi qu’est créé « un droit à indemnisation pour les organisations syndicales qui se verraient retirer le bénéfice de l’usage d’un local qu’elles occupaient depuis une durée d’au moins cinq ans, [et] lorsque aucune possibilité de mise à disposition de locaux lui permettant de poursuivre ses activités ne lui aura été proposé ».

Le projet de loi n’évoque pas le montant de l’indemnisation. Sera-t-il fixé par décret ou sera-t-il laissé à l’appréciation du juge ? L’avenir nous le dira.

En attendant, c’est encore une charge supplémentaire qui va peser sur les collectivités locales, et par ricochet sur les contribuables.

Alors que les mairies et les départements ont des finances de plus en plus exsangues, on les contraint à continuer de subventionner des syndicats nullement représentatifs et qui bénéficient déjà de nombreux subsides publics. Surtout que les locaux occupés par les organisations syndicales pourraient servir autrement « l’intérêt général ».

Ainsi à Foix, dans l’Ariège, la mairie souhaite récupérer les deux bureaux occupés à titre gratuit, dans un immeuble municipal, par l’union locale de la CGT depuis les années 90. L’immeuble va en effet être vendu pour que soient créés six logements dans le centre historique de la ville. La CGT s’y oppose, bien sûr.

Il n’est pas sain que les syndicats soient constamment subventionnés par les contribuables et à leur insu. C’est aux organisations syndicales de louer les locaux dont elles ont besoin pour leurs activités avec l’argent des cotisations de leurs adhérents.

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