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Plaidoyer pour les Humanités

Dans son dernier livre – « Le choc des incultures » - Francis Balle plaide pour un équilibre entre les différentes cultures. Surtout, il défend la culture classique. Un plaidoyer qui concerne aussi le monde de l’entreprise.

L'inculture dans l'entreprise commence avec les fautes d'orthographe

Francis Balle est un expert reconnu des médias. Cet ancien membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) prépare la 17ème édition de son manuel « Médias et société ».

Son dernier ouvrage – « Le choc des incultures. Les vrais perdants de l’hypermodernité » – s’éloigne quelque peu du sujet habituel de l’auteur. Quel est son propos ?

Tout d’abord, il défend l’idée qu’avec le XXIe siècle nous sommes entrés dans un autre monde. La modernité a été dopée par deux événements majeurs : la mondialisation économique, consécutive à la chute du rideau de fer, et la révolution numérique. Pour l’auteur, nous sommes désormais dans l’hypermodernité.

Cette hypermodernité est, entre autre, marquée par une concurrence, une rivalité, entre les différentes cultures. Aujourd’hui, la culture scientifique et technique et la culture médiatique semblent prendre le dessus. Elles sont alliées pour fournir « l’industrie et les divertissements modernes ». Elles ont « le culte du présent, jusqu’à son obsession, le présentisme ».

De l’autre côté du spectre, il y a les perdants de l’hypermodernité : les cultures populaires, « celles qui s’inscrivent à l’intérieur des frontières d’un terroir, transmises de génération en génération ». Et puis, LA culture, « la seule légitime, la seule méritant cette appellation aux yeux des artistes, des écrivains, des historiens ou des philosophes ».

Dans la compétition qui les oppose, nous dit Francis Balle, ces différentes cultures sont amenées à faire de la surenchère pour se distinguer. Elles poussent leur logique jusqu’au bout, elles sont « exacerbées, durcies souvent en idéologies », jusqu’à devenir « incultures ». C’est ainsi, par exemple, que des savants reconnus sont véritablement incultes.

Et Francis Balle de prôner un retour à l’équilibre. Il défend l’idée de « redonner à chacune de ces cultures sa juste place, afin que chacune soit pour les autres un rempart contre leurs propres abus, contre leurs dérives éventuelles, contre leurs perversions toujours possibles mais jamais inévitables ». Un retour à l’équilibre qui ne peut passer que par un retour des Humanités, en particulier à l’école.

Francis Balle aurait pu appeler Hannah Arendt à la rescousse qui voyait dans « la pure absence de pensée » d’Eichmann le fait qu’il soit devenu « un des plus grands criminels de son époque ».

Et l’entreprise dans tout ça ? Nous avons déjà dénoncé, à la suite de François Dupuy, cette « inculture générale et particulière qui a envahi le monde de l’entreprise ».

Elle pourrait bien débuter par la non-maîtrise de l’orthographe. Cette dernière, en effet, prend une place de plus en plus importante dans la vie quotidienne, avec le développement des courriels, des post sur les réseaux sociaux ou des SMS. Christelle Martin-Lacroux, de l’université de Toulon, a mesuré que 70 % des salariés sont rédacteurs quotidiens de documents. Et même que 31 % d’entre eux passent un quart de leur journée à rédiger.

Les employeurs et les recruteurs sont donc très sensibilisés au sujet : ils sont 81 % à considérer l’absence de maîtrise de l’orthographe comme un obstacle pour retenir la candidature d’un cadre.

Les plus optimistes – ou pessimistes, c’est selon – minimiseront l’affaire. Encore quelques années et les recruteurs seront aussi nuls que les candidats. Les « énaurmes fôtes » passeront alors inaperçues. À moins que les correcteurs automatiques d’orthographe nous sauvent tous.

Cela n’en resterait pas moins une victoire de l’inculture. Et Hannah Arendt aurait encore raison, elle qui craignait que nous ayons un jour « besoin de machines pour penser et pour parler à notre place ».

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